Le rap n’est pas une question d’âge mais de talent, Bigflo & Oli, âgés de 22 et 19 ans nous le prouvent. Avec ces jeunes toulousains il n’est pas question d’egotrip mais de rap conscient. Tout est dans le message et pas seulement dans l’image. En ce 1er juin 2015, ils sortent leur premier album La Cour des grands .
Bigflo & Oli aspirent à rentrer dans La Cour des grands, dès le début de leur album ils affichent leur ambition. Ils nous montrent que le rap conscient c’est « une question de rage, de foi et de musique ». Est-ce le triptyque gagnant ? On y croit surtout quand on voit qu’ils ont de leur côté un débit assez impressionnant.
C’est bien de connaître leurs rêves mais C’est qui ces deux là ? Deux jeunes frères qui ont « pas la gueule de l’emploi » mais qui connaissent leur(s) valeur(s). Et dans le rap game, « la valeur n’attend point le nombre des années » comme disait Pierre Corneille surtout quand on a plein d’humour comme Bigflo & Oli.
A certains moments, on serait tenté de les comparer aux Casseurs Flowters surtout avec le titre Comme d’hab qui nous plonge dans la routine du quotidien. C’est déjà un tube voire même la chanson de votre été que vous rapperez à tue-tête dans votre voiture ! Enfin, à condition que vous ne soyez pas coincés dans un (Le) Bouchon . Nos rappeurs nous livrent un son à caractère social où par le biais de destins croisés, ils nous font comprendre que « bien souvent nos vies ressemblent à ce bouchon ».
On continue notre chemin avec Marco avec un thème grave qui aborde l’expérience de la mort. On est alors en mesure de parler de maturité en ce qui concerne le rap de Bigflo & Oli. Ensuite, nous prenons le large avec J’attends la vague qui nous donne la raison pour laquelle ces deux frères ont décidé de se lancer dans le rap. Leur direction est choisi, on est face à un rap conscient et désarticulé.
Après avoir affronté les bouchons, attendu la vague, on Raccroche la combinaison de surfeur pour se laisser aller sur un combo ukulele, rap, amour et amitié.
Après cette parenthèse, le retour à la réalité fait mal lorsqu’on écoute Le cordon. Les auditeurs sont au milieu d’une discussion entre un fœtus avorté et sa mère. C’est un sujet lourd mais magnifiquement abordé par le texte de Bigflo & Oli.
Aujourd’hui, on positive, on apprécie les petits plaisirs de la vie, on rêve d’un lendemain meilleur. Après tout Ça coûte rien ! Nos jeunes MC accélèrent le rythme avec une bonne instru pour un rap très optimiste. Le message est simple , on a tout le temps de se faire de l’argent, l’important c’est de vivre.
Nos vies sont ponctuées de faits divers tels que des braquages de bijouterie. Avec Le bijoutier, ils nous montrent que dans ce genre d’affaires rien n’est ni tout blanc ni tout noir comme ça l’est dans les journaux. Ils réutilisent ici le même procédé qu’avec Le cordon en envisageant les deux points de vue, celui du bijoutier et celui du braqueur. Une des phrases qui reste est la suivante : « Est ce que la faim m’a transformé en monstre? »
L’album continue avec Nous aussi, un son qui envoie. Pas étonnant qu’il ait été le premier single de l’album. Le flow d’Oli ainsi que ses punchlines nous embarque immédiatement dans la chanson. On y parle d’un rap en déclin mais ne vous inquiétez pas, ils sont là pour combler le vide, en passe d’entrer dans La Cour des grands ?
Derrière Nik ta mère, insulte mal orthographiée, se cache une dénonciation d’une discrimination qui persiste envers la jeunesse des cités qu’on laisse en perdition au lieu de l’aider et défendre les valeurs de la République que sont «Liberté, Egalité, Fraternité ».
On dit qu’on reconnaît un sage à sa barbe, mais Oli est Le philosophe sans la barbe. Il est la preuve que l’on peut être sage mais jeune avec de belles références au film Le Cercle des poètes disparus et à Claude Nougaro. On voit les différentes influences qui créent un texte de rap et c’est plutôt beau.
Si on parlait de rap conscient avec Miroir on peut même parler de rap self-conscient en miroir avec son autre soi.
On arrive à la fin de l’album et Bigflo & Oli nous annonce que tout ça C’est pas du rap « c’est de la musique », le tout sur une ambiance jazzy avec une référence appréciable à Chet Baker. Et oui, le rap c’est avant tout de la musique,une harmonie entre un flow, une instru et un texte.
Bref, Bigflo & Oli, on vous autorise à entrer dans La Cour des grands. Avec eux, on oublie le rap sale, on réfléchit et on s’enjaille.