BRNS : « L’été, on relâche la pression »

Le 7 juillet, rencontre avec Antoine et Tim, du groupe de pop rock indé belge BRNS, dans les coulisses du festival La Fête du Bruit de Saint-Nolff (dont le retour est à lire sur le site Tous les festivals). Au programme de l’interview, bien sûr, la demi-finale de la Coupe du monde de football, leur outsidisme musical, et, puisque l’été y est propice, leurs festivals préférés.

BRNS
Crédit photo : Geert De Taye.
Efflorescence Culturelle : Le match de foot de la Belgique en pleine tournée, et en pleine Coupe du monde ça matche bien avec votre emploi du temps ?

Tim Philippe (guitare) : J’ai pas vraiment souvenir d’avoir été en tournée pile au moment de la Coupe du monde et au moment même où la France jouait. Pendant notre concert, il y avait le match de la France diffusé à côté de nous, et même pendant la première mi-temps, derrière nous, mais ça c’est même nous qui l’avions demandé. Non seulement pour pouvoir jeter un petit coup d’œil de temps en temps, mais surtout pour qu’on l’impression que les gens regardent vers nous alors qu’ils regardent en fait le match. Pour la deuxième mi-temps, l’organisation du festival a préféré le mettre juste sur l’écran d’à côté, du coup t’avais des mecs qui étaient juste en face de nous mais qui étaient vraiment de trois quart pour regarder le match.

Pendant le concert de BRNS, les festivaliers ont pu suivre le match de foot sur grand écran. Crédit photo : François Destoc/Le Télégramme.
Vous vous voyez jouer contre la France ou l’Uruguay en demi-finale, le 10 juillet ?

Tim : Pour en revenir aux quarts de finale, aujourd’hui, j’aurais imaginé qu’il y aurait au moins un but de l’Uruguay, je pensais que le score allait être un peu plus serré…. Après on n’a pas vu tout le match, on était sur scène. Apparemment il y a eu quelques arrêts, quand même, du gardien français, Hugo Lloris. Honnêtement, je ne m’imaginais pas que la Belgique allait gagner contre le Brésil non plus. Je ne voyais pas aussi loin. Ce qui est sûr, c’est que mardi, pour la demi-finale, on ne jouera pas, et on arrêtera même la répet pour regarder le match.

Etre programmés aujourd’hui parmi Indochine et Macklemore, ça fait quoi ?

Tim : Pour être honnêtes, c’est un festival avec beaucoup de têtes d’affiche, mais peu de petits groupes subversifs, alternatifs. A ce titre, on est un peu la caution « indé » de chaque festival, de l’outsidisme… Nous, on est dans un genre différent. On aime surprendre, on n’a jamais emprunté des choix musicaux formatés.

Y a t il une différence pour vous de jouer dans la ville ou dans les champs ?

Tim : Les festivals, ce sont souvent l’occasion de jouer sur des plus grandes scènes que d’habitude.

Antoine Meersseman (claviers et basse) : On ne joue pas non plus beaucoup dans les grandes villes, ni en plein air. Mais la grosse différence pour nous, c’est surtout le plein air ou la salle. C’est moins confortable de jouer en festival en plein air.

Tim : Surtout en journée. Quand c’est hyper éclairé, c’est difficile d’installer une ambiance. Nous on est plutôt dans des petits lieux où il fait plus sombre, avec des jeux de lumières assez travaillés. On fait pas une musique hyper joviale et fédératrice, vraiment taillée pour le festival. Mais ça bouge quand même, il y a des gens qui peuvent s’y raccrocher, même s’ils ne connaissent pas. Mais c’est un peu moins évident. L’été favorise aussi l’éclectisme sur la scène des festivals, avec des styles différents, plus grand public. En ce sens, c’est aussi un défi pour les musiciens : il faut aller chercher les gens du public parce qu’ils ne sont pas spécialement là pour nous.

Antoine : L’été, en festival, c’est un peu la période sans pression. Les enjeux sont différents. Tu ne peux que gagner du public. T’as moins la pression et le stress que quand tu joues en salle, car, pour le coup, les gens là, ne viennent vraiment que pour toi. Tu as pas trop droit à l’erreur, car les fans vont pas être trop contents.

Un festival fondateur pour le groupe ?

Tim : Il y en a plusieurs qui sont marquants, mais je pense que le premier, vraiment, c’est un tout petit festival en Belgique, à Namur, qui s’appelle le Verdur Rock. On a gagné le concours-tremplin en 2011. Dans notre carrière, on en était qu’à notre 4e ou 5e concert. Ça a vraiment lancé le groupe, puis après ça, en octobre, on a fait notre première date à Paris. On a rencontré notre bookeuse, avec qui on travaille toujours aujourd’hui… Après, un autre festival hyper cool, c’était le Paléo en Suisse, il y avait une super cool ambiance.

Antoine : En France, quand on a fait Rock en Seine aussi, en 2012. Ce qui était fou, c’est que notre disque n’était pas sorti en France encore, et on donc on jouait sur la scène de ce festival sans disque. Ce qui est assez fou. C’était la première fois où on jouait devant autant de monde, 3 000 personnes devant nous à tout casser… C’était une époque aussi, où on était considéré comme outsider, sur le live, c’était agréable, les gens restaient écouter parce qu’ils ne nous connaissaient pas.

Aujourd’hui, est-ce que vous considérez encore comme des outsider ou vous avez une autre image de ce que vous pensez donner ?

Antoine : On est devenu une institution dans l’outsidisme. Les gens sont habitués à ça je pense.

Tim : Je pense qu’on est établi à partir du moment où il y a un groupe de gens qui nous suit. On a un public relativement fidèle, mais, d’un autre côté, relativement restreint. Donc on est toujours là, on tourne, le projet continue à vivre mais par contre, comme on continue d’avoir des choix qui ne sont pas forcément hyper formatés, le projet continue à grandir mais à échelle humaine. Mais dans un festival comme La Fête du bruit, on reste totalement des outsider, on est les petits poucets. Tout à l’heure, je regardais le nombre de fans sur Facebook. Nous on est à 25 000, le groupe qui joue après est à 600 000, ceux encore après à un million. Là, on reste des outsider.

A votre avis, qu’est-ce qui plait chez vous aux programmateurs de festivals ?

Antoine : C’est un truc bizarre à dire, mais on est un peu la caution indé de certains festivals. C’est le cas ici. Ce n’est pas le genre de programmation musicale qui nous fait rêver, mais on va quand même dire qu’on va mettre un petit groupe indé. Et on est là. Et ça a été le cas assez souvent, et c’est assez marrant, notamment il y a pas mal de festivals qui ont changé leur fusil d’épaule, des gens qui faisaient de l’indé au départ et qui ont compris qu’ils pouvaient se faire du bif mais qui disent « on va toujours faire un peu de l’indé pour montrer qu’on vient de là ». Et, parfois, ça donne des situations assez bizarres. Par exemple, les Ardentes, l’année passée, qui était un festival rock auparavant, mais qui est devenu hip-hop, et qui continue à nous inviter, on ne comprend pas trop.

Tim : Mais d’un autre côté, on est content d’être là. Ça nous permet d’être découverts, de découvrir d’autres publics. Mais je pense qu’il y a chez les programmateurs, une sorte de « calcul » sur la caution indé, mais d’un autre côté, il y a peut-être, effectivement, une vraie sincérité de se dire que le public va pouvoir apprécier quelque chose de différent. Par exemple aux Francos en Belgique. Le public était familial. En même temps, on n’a pas vraiment de cible… Tant qu’on fait la musique qu’on aime.

Une scène où vous pourriez rejouer à vie ?
Antoine : Le festival Fusion, au nord-est de l’Allemagne. On y a joué cette année. La scène est atypique, imaginez un chant diphonique mongole succédé par un quatuor de jazz, et puis, sur une autre scène, des DJ avec de la minimale. En Allemagne, il y a beaucoup de festivals de taille moyenne avec des affiches pas toujours très attendues. Il y a d’ailleurs des groupes locaux qu’on retrouve systématiquement. Là-bas, on joue aussi dans des endroits où l’affiche est beaucoup plus aléatoire… L’ambiance peut être très étonnante ! Les gens sont super chauds, et enthousiastes pour à peu près tout, et c’est très agréable. 

Tim : Mais il y a aussi des endroits où on n’a jamais été, et qui nous tenteraient bien, comme le Sziget en Hongrie, ou d’autres en Angleterre… Mais ils sont très durs à avoir.

Un festival que vous recommanderiez aux festivaliers ?

Antoine : J’ai fait deux fois le Primavera à Porto. J’aime vraiment bien les festivals de trentenaires, assez cool, avec une chouette affiche du style Pitchfork, et un peu confortable. J’ai rien contre le camping, mais pas en festival où les gens s’écrasent sur ma tente. J’aime vraiment bien l’expérience d’être dans un festival ancré dans une ville, c’est très différent. Ce que je trouve très oppressant, c’est d’être toujours au même endroit dans un camping, j’aime bien pouvoir sortir un peu. A Porto, t’es dans la ville, tu vas un peu à la plage, en plus les concerts commencent super tard, à 18 h, donc tu as toute la journée devant toi. Il y en a de plus en plus à opter pour cette formule.

Propos recueillis par
Lucile Moy
et Caroline Guillaume

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