Ben Howard, le prodige qui a gagné sa place dans la lumière

Trois ans après la sortie de son premier album, le jeune prodige anglais revient et il a gagné en maturité. Avec I Forget Where We Were, il nous offre un monde plus sombre qui ne fait que confirmer sa place dans la lumière.

Ben Howard renoue avec l’électro

Ben Howard c’est ce genre d’artistes qui vous laisse imaginer que la musique est une chose aisée, à portée de toutes les mains. A seulement vingt-et-un ans le surdoué originaire du Devon commence sa carrière de musicien avec son premier EP : Games in the Dark. L’anglais mettra trois ans à se faire une place parmi les artistes à suivre. Les deux EPs suivants : These Waters et The Old Pine viennent sceller le cercle de fans autour de lui. En 2011, la parution de son premier album Every Kingdom, est une révélation. Le monde musical découvre ce jeune artiste talentueux, ce prodige de la guitare sorti des contrées anglaises qui nous enchante par sa folk joyeuse. Ses mélodies entraînantes et authentiques amènent l’air estival, venant rappeler les douces soirées d’été. On en vient presque à imaginer le soleil réchauffant nos peaux dorées. Certaines chansons paraissent influencées par Jack Johnson.

Ben Howard n’est pas un chanteur parmi tant d’autres, il ne cesse de se démarquer, notamment par son jeu de guitare à plat, bien distinctif tout droit sorti de celui de John Smith. Pourtant, le britannique prend des risques et nous le prouve avec son dernier EP sorti en 2012 : The Burgh Island. Cette semaine à l’occasion de la sortie de son deuxième album : I Forget Where We Were, le musicien de vingt-sept ans nous plonge dans son univers profond, riche en contraste.

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La première chose que l’on remarque à l’écoute de I Forget Where We Were, c’est le changement d’ambiance, presque radical, avec Every Kingdom. L’atmosphère générale est plus sombre, plus électrique, presque saturée à certains moments que l’on avait déjà éprouvé avec son dernier EP. En ressort une plus grande profondeur, comme si l’on plongeait dans un abîme de sentiments et de pensées, parfois obscures, parfois abstraites.

Dès le début, la piste Small Things marque ce tournant, s’ouvrant avec une guitare électrique légèrement distordue, donnant du relief à ce morceau. Les paroles sont méditatives, parfois hésitantes, dans une interrogation « le monde est-il devenu fou ou est-ce juste moi ? » On est là dans un univers musical plus recherché qui se poursuit tout au long de l’album avec des pistes chargées d’une électricité lancinante : Evergreen, I Forget Where We Were.

Electrique est d’ailleurs l’un des mots que l’on pourrait prêter à ce second opus. Où la guitare folk acoustique régnait en maître sur Every Kingdom, l’électronique occupe presque toute la place dans son successeur. Elle se décline en rifs mélodiques formant l’arrière-plan de plusieurs chansons comme Time Is Dancing, elle s’emporte parfois en notes planantes comme dans la sublime Conrad ou paraît s’emballer à la fin de End Of The Affair.

Screen-Shot-2014-10-16-at-8.51.23-PMOn ressent dans cette musique une nouvelle maturité pour le chanteur anglais, qui n’hésite pas à prendre des risques et à se lancer sur une nouvelle route. Les chansons sont plus longues, laissant davantage de place aux instruments et à certains bridges et solos de fin qui emportent et transcendent presque. L’autre dimension nous appelle. La batterie marque un rythme, comme les battements de coeur d’une mélodie qui s’envole et replonge pour mieux exorciser l’obscurité de ce nouvel univers musical que nous présente Ben Howard. Après une écoute attentive, il est évident que les arrangements sont justes, parfaits et sans dérapages, dans un nuancier que l’on semble redécouvrir à chaque écoute ; une basse dissimulée mais non pas moins essentielles, une seconde voix ajoutées à celle du chanteur.

End of The Affair n’est pas une piste cachée parmi beaucoup d’autres. Premier extrait dévoilé par le musicien, la chanson est une perle convoitée par bien des navigateurs. La lenteur du rythme vient appuyer chaque note, vient les graver dans nos esprits jusqu’à l’arrivée des vagues et de la tempête en plein milieu du morceau. On sent venir cette rupture annoncée. Les instruments déchaînés viennent alors nous rappeler la qualité première de Ben Howard, ses talents de compositeurs.  L’envoûtement électronique se produit durant ce solo hypnotique. Chaque seconde se savoure, se déguste avec plaisir. Et quand les sept minutes quarante-six se terminent, la première volonté est de ne jamais terminer cette histoire intense. La recommencer inlassablement.

Au milieu de cette nébuleuse électrique, on retrouve la planante Conrad, qui nous emporte dans un voyage au bord du monde. Au coeur d’un océan de solitude, on découvre un lien qui fût auparavant fort et qui le demeure encore maintenant. Un être à qui l’on se raccroche, comme une bouée de sauvetage, comme un bâteau qui permet de naviguer dans les brumes d’un monde froid. La guitare mélodique porte cette histoire emprunte d’un quasi je-m’en-foutisme, tant qu’il n’y a que toi et moi. Et plus loin, très loin ce monde autour, qui nous est hostile. L’air se répète en échos vertigineux.

Malgré ce changement, on retrouve quelques petits vestiges d’Every Kingdom et la folk acoustique des premiers temps n’a pas totalement déserté l’univers d’Howard. Un morceau comme She Treats Me Well offre même une pause plus légère et des paroles moins méditatives, partageant le début d’une histoire d’amour qui semble résoudre des blessures de coeur passées. Les plaies sont pansées par la douceur de la voix de l’anglais. Une guitare comme celles que l’on a aimées au tout début, un air plus enjoué. La mélancolie disparaît, cédant sa place à la luminosité. Un instant de clarté parmi l’obscurité.

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I Forget Where We Were marque un tournant dans la route suivie par le virtuose anglais. Ben Howard surprend son public en prenant des risques musicaux qui nous plongent dans les profondeurs envoûtantes grâce à l’intensité de mélodies toujours plus soignées. Le diamant brut n’est plus, la folk heureuse n’existe plus, les années de travail l’ont poli pour le sublimer. Cet opus sombre nous le prouve de la plus belle des façons.

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I Forget Where Were est disponible depuis le 20 Octobre.

Article écrit à quatre mains par Lily et Clémentine.

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